Concept
En 1981, McLaren Racing fut le 1er team de Formule 1 à utiliser une coque en carbone pour une monoplace. Le 1er coupé de route, la F1, sera construit du même matériau un an plus tard. McLaren Automotive fut fondé en 2010 pour relancer la production en série en partant de la MP4-12C. En à peine 6 ans, la plus jeune marque de sportives exclusives a réussi à se fourbir de 3 gammes de GT : les Sports Series, les Super (Sports forcément) Series et les Ultimate (Sports à l’évidence) Series. Après 70 ans d’existence, Ferrari n’est pas en mesure de présenter une offre plus fournie. Les 3 familles de modèles McLaren ont un tronc et un cœur communs : une structure monocoque en fibre de carbone, un moteur V8 biturbo implanté en position centrale arrière et développé avec le concours de Ricardo. Partant de cette architecture partagée, mises au point, dimensions et puissance des modèles diffèrent.
- Performances et qualités de comportement ultimes
- Cockpit accessible, peu confiné, visibilité périphérique
- Ligne magnifique, super-aérodynamique et efficace
- Hauts de portes vitrés (option) à… «effet de serre»
- Ergonomie des commandes d’agrément (sièges…)
- Quelques détails de finition plastique dénotent...
Ce qui change
Pas moins de 91% des composants de cette nouvelle recrue chez les Super Series sont inédits, dont 41% des éléments constitutifs du moteur. On peut donc parler de véritable 2e génération du milieu de gamme McLaren, à l’inverse de la 650S (2014) qui n’était qu’un face-lift approfondi de la MP4-12C (2011). Même si, entre autres, l’empattement demeure inchangé (à 2,67 m), l’ossature en carbone de la 720S marque une grosse évolution en ce sens qu’elle abandonne la «cuve» des MP4-12C et 650S pour adopter une partie aérienne également en carbone, s’inspirant en cela de la Monocage I de la P1. La Monocage II étrennée par la 720S a donc une structure de toit et un encadrement de pare-brise en carbone. Par rapport à sa devancière (la 650S Coupé), la 720S Coupé s’allège de 18 kg (pour faire 1.283 kg à sec et 1.419 kg tous pleins faits) non sans abaisser encore son centre de gravité.
Assurant la relève de la 650S dans la gamme des Super Series, la 720S ne se contente pas d’étrenner un nouveau squelette, elle change carrément de peau. Le toit profite de la finesse de ses montants en carbone pour maximiser les surfaces vitrées, dégageant ainsi une visibilité périphérique assez unique (360° !) pour une GT sportive à moteur central arrière. Ce dôme de cockpit vitré – semblable à celui d’un avion de chasse – libère une plage derrière les passagers qui n’existait pas avant et qui destine 210 dm3 aux rangements d’objets souples (vestes…) à ajouter aux 150 dm3 de coffre avant. Le moteur central arrière est ancré 1,2 cm plus près du sol, ce qui participe à l’abaissement du centre de gravité mais aussi au volume exploitable entre la plage arrière et la baie vitrée.
La 2e transformation esthétique majeure touche le façonnage des flancs, débarrassés des écopes d’air qui les entaillaient jusqu’ici. Les radiateurs arrière reçoivent leur flux de refroidissement désormais canalisé par des gouttières qui courent le long de la ceinture de caisse. Les prises d’air latérales sont assurées par de longues gorges masquées par une double peau placée sur les portières en élytres (dont la cinématique forme un dièdre). La traînée en sortirait mieux contrôlée et l’efficacité aérodynamique aurait doublé (le ratio appui/traînée), sans compter que la silhouette du bolide gagne en originalité et cohérence.
L’influence de la P1 se retrouve encore dans les orbites de phares, les prises d’air avant et l’ensemble du profil aérodynamique. L’aileron met désormais moins de 0,5 s pour basculer dans sa position aérofrein. Le refroidissement du V8 biturbo serait 15% plus efficace. Comme celui des 540C et 570GT/S, le moteur de la 720S a adopté un système stop & start qui lui permet de revendiquer une consommation en baisse (de 1 l/100 sur la moyenne NEDC, soit 10,7 au lieu de 11,7 l/100 pour la 650S). Il demeure fidèle à l’injection indirecte (dans les pipes d’admission et non dans les chambres) non sans, pour la première fois, doubler le nombre d’injecteur. Au bilan, il avance les consommations et émissions de CO2 (249 g/km en cycle combiné) les plus basses de la catégorie des supercars à laquelle il appartient.
Plus concrètement, le 8 cylindres gagne 195 cm3 par augmentation de la course de 3,6 mm pour dorénavant cuber 4 litres de cylindrée. Par rapport au 3,8 litres (M838T – qui reste en service sur 540C, 570GT et 570S) qu’il remplace, le 4 litres (M840T) développe 70 ch (soit 720 ch à 7500 tr/min) et 92 Nm (770 Nm à 5500 tr/min) de mieux ; de nouvelles caractéristiques qu’il doit à l’augmentation de cylindrée certes, mais aussi à l’allègement généralisé de toutes ses pièces mobiles (bielles, pistons, vilebrequin, turbines des turbos), à un boîtier d’admission et à un double échappement redessinés. Allégé, ce dernier cumule tout le raffinement de celui de la 570 GT (aux régimes paisibles) et les clameurs viscérales (dans la transe des derniers tours avant la zone rouge) de celui de la 675 LT !
Comment ça roule
Le cockpit de la 720S se veut le plus «welcoming» parmi les supercars à portes en élytres. Celles-ci atteignent ici 80° d’ouverture, soit de quoi permettre aux grands – et corpulents – gabarits de se glisser derrière les commandes – ou de s’en extraire – sans contorsions... Moins encombrantes en hauteur et en largeur (caractéristiques utiles dans les parkings exigus), les portes de ce coupé GT se lèvent en dégageant une baie plus large, mais en laissant aussi une échancrure dans le toit – à la façon des T-Bar roofs (à la «Ford GT 40» et, bien sûr, à la McLaren F1 qui se singularisait par des ouvrants jusqu’à mi-toit) – facilitant encore l’accès à bord. Sur nos voitures d’essai, premiers exemplaires de série, ces «demi-toits» de portes étaient vitrés (une option à 2.840 € qui n’inclut pas de velum). Voilà qui ajoute de la lumière dans l’habitacle et une paire de cm pour ne pas toucher le plafond avec un casque, sans pourtant nous convaincre d’une autre utilité. Pire, nous avons très vite trouvé le cockpit étouffant – alors qu’il faisait à peine 20°C à l’extérieur avec un soleil pas mordant pour un sou… – et difficile à réfrigérer à l’aide de la clim’. Vite trop chaud. Vite trop froid… Localisés sur l’écran central et distrayants, les curseurs tactiles d’ajustement de la température n’aident pas vraiment. Il suffit de ne pas opter pour ces «gorilla glasses» ou attendre la sortie de la 720S Spider…
Certaines commandes se révèlent d’emblée peu intuitives. Nous avons beaucoup tâtonné pour nous familiariser avec les boutons des réglages électriques des sièges (optionnels à 3.490 €), tout comme avec l’ouverture du couvercle du casier central (un cliquet en alu massif mais trop dur et mal placé). D’autres, qui concernent directement la conduite, sont nettement plus praticables et, du reste, familiers puisque la plupart nous viennent de la MP4 12C, dont les 2 «manettini» de sélection des modes de conduite. McLaren se limite toujours à 3 programmes – Confort, Sport et Track – tant pour les pré-réglages du châssis (Handling) que ceux du tandem moteur-boîte (Power Train). Quoi de plus logique que de ne pas disposer d’un mode normal, puisque rien ne peut être banal sur un tel bolide !
Toujours très lisible, le combiné à instruments innove en cela qu’il bascule sur 2 positions : plein écran digital pour tout afficher ou pivoté de 90° vers l’arrière, pour présenter la partie plate du module n’indiquant plus que la vitesse, le régime et le rapport engagé. Cette position «renversée» dégage une visibilité maximale non sans donner les infos essentielles au pilotage sur circuit. Partiellement couvert de carbone, ce boîtier-compteurs pivotant flatte davantage la qualité perçue debout que couché où il exhibe un dos en plastique bon marché.
Les liaisons au sol ont été optimisées. Les metteurs au point de McLaren sont parvenus à gagner 16 kg sur les triangles de suspension en alu. Le pilotage des amortisseurs (Proactive Chassis Control II) marque des progrès en vitesse de réaction, quel que soit le mode engagé. Nous avons effectué les premiers km de prise en mains entre Rome et l’autodrome de Vallelunga, sur un tracé de routes secondaires bombées sinueuses, étroites, sans accotements et parsemées de portions pas toujours en bon état. Le toucher de route demeure malgré tout très filtrant, même si la suspension nous a paru toujours plus dure que celle de la 650S y compris en mode confort.
Moins délibérément radicale et sonore que la 675 LT, la 720S semble aussi rapide et efficace. McLaren demeure fidèle à l’assistance de direction électro-hydraulique, capable de diffuser une sensation mécanique plus naturelle qu’un servo purement électrique. Le paramétrage de la servodirection est unique en ce sens qu’il est le même sur tous les modes (Confort, Sport, Track) et c’est une bonne chose. La précision du volant est millimétrique tout comme le dosage des freins – disques en carbone céramique de série – est hyper naturel, le toucher de pédale «en bois» n’exigeant jamais de corriger l’effort – toujours bref et bien senti – qu’on y exerce. L’emprise des Pirelli P Zero sur le sec achève de nous envelopper dans une confiance qui recule les limites en libérant la constance et la concentration d’un pilote de GT Pro… Au point de freiner tard et/ou de réaccélérer tôt pour avaler les lacets des routes publiques sans le moindre émoi.
L’extraordinaire réactivité du nouveau V8 biturbo fait le reste. Très civilisé et docile au quotidien en mode confort (cool), il se mue progressivement en moteur de course en modes sport et track. Nous avons ensuite poussé les limites de la 720S beaucoup plus loin, sur le circuit romain, équipé en Pirelli P Zero Corsa (livrables sans supplément) et histoire de conserver la qualité des pneus de série une dimension plus haut dans la sphère de la performance ultime. Ce tracé technique nous a dévoilé une supersportive qui se laisse cerner graduellement, grâce à son nouveau mode de contrôle de dérive. On savait déjà que la 650S se passait d’autobloquant mécanique ou mixte à l’arrière, pour lui préférer un contrôle électronique de chaque roue via les freins et le contrôle de stabilité. Nouveau, le Variable Drift Control nous permet de moduler les mises à l’équerre tout en étant assisté par l’électronique. Contrôle de stabilité en mode Dynamique en Sport, ou carrément en Track, il est possible de choisir via un curseur entre une dérive gentillette et un drift sauvage, avec les situations intermédiaires. Dans ce cas, c’est la voiture qui mène la valse en mâchant la besogne du pilote – mais sans jamais cesser de l’impliquer ! Bien sûr, tout peut être désactivé afin de laisser le pilotage 100% naturel reprendre ses droits. La 720S a donc tous les tours dans son sac ! Même celui de diminuer le risque, pour le pilote néophyte, de passer par le bac à sable.
Budget/équipement
En version Coupé, la 720S coûte 251.285 €, soit 12.785 € de plus que la 650S qu’elle remplace. À elle seule, la structure en carbone fermée (la Monocage II dérivée de celle de la P1) justifie ce supplément de prix par rapport à la coque en carbone «ouverte» qui prévalait sur la 650S. La nouveau modèle est aussi mieux équipé ou, à tout le moins, mieux peaufiné encore. En exécution Luxury (intérieur cuir étendu) ou Performance (intérieur Nappa-Alcantara étendu), soit les voitures de la présentation dotées, outre les détails cosmétiques qui les singularisent, de sièges électriques chauffants et d’un éclairage d’ambiance, la 720S revient à 261.345 €. Avec des peintures spéciales, un échappement sport, une télémétrie sophistiquée, un système audio Bowers & Wilkins de haut vol, une assistance au stationnement et une profusion d’options en carbone, les prix s’affolent. Pour donner une idée, notre 1ère 720S testée était une Performance orange Azores pourvue de 13 options, portant la facture à 298.545 €.
Les concurrentes
Techniquement et philosophiquement, la Ferrari 488 GTB (221.427 €) est sa plus proche rivale… moins chère mais – si, si ! – moins exclusive ! Plus lourde et moins puissante, la belle italienne reste derrière la divine anglaise qui lui met 3,5 s dans la vue en accélération de 0 à 300 km/h (21,4 s contre 24,9 s) et 4 s pleines à sa devancière, la 650S (25,4 s). La 720S fait mieux en pointe : 341 km/h contre 331 km/h pour la 488 GTB et 333 km/h pour la 650S qui tire sa révérence.
Notre verdict
La 720S est plus rapide que sa devancière – la 650S – partout, et se paie le luxe de laisser la Ferrari 488 GTB derrière. Sans compter que, pour la première fois, l’anglaise rivalise de beauté et d’élégance avec l’italienne. Elle floute la barrière entre supercars et hypercars, plus performante que les premières et très nettement plus maîtrisable/exploitable que les secondes. McLaren détient là la nouvelle référence ultime chez les coupés GT à 2 roues motrices et moteur arrière qui soient utilisables au quotidien.
Dans cet article : McLaren
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