David, ne nous mentez pas : on ne rêve pas de devenir designer pour Dacia. Comment êtes-vous arrivé là ?
Vous avez un peu raison dans le sens ou lorsque j’ai obtenu mon diplôme de design, l’ère moderne de Dacia, sous l’impulsion de Louis Schweitzer, n’existait pas ! Mais je suis arrivé par la grande porte, celle de Renault. Par la voie des concours internes je me suis retrouvé dans l’aventure Dacia et aujourd’hui je peux vous assurer que j’en suis très heureux. Depuis le début, Dacia est une marque alternative. Le rationalisme et le minimalisme qui la caractérisent sont des qualités pour un designer. Notre marque impose de travailler différemment. Ne croyez surtout pas que dessiner une Dacia est une chose facile. Notre leitmotiv « Design for no extra cost », impose même plus de réflexion.
À ce propos, quelles sont vos inspirations en matière de minimalisme, de design essentiel ?
J’ai envie de vous citer le designer industriel allemand Dieter Rams, en particulier son travail pour la marque Braun. C’est un adepte du Less is more. Ses radios des années 60 sont magnifiques de simplicité. Le même son sort d’une autre radio ‘grand public’, mais semble plus harmonieux et efficace par la grâce du design de l’objet. Le travail de Rams intègre des principes que nous appliquons aujourd’hui chez Dacia : innovation, utilité, esthétique, durabilité.
Pour certains modèles, comme la Sandero, Renault vous mache bien le travail. Rencontrez-vous souvent vos collègues de la marque mère ?
Évidemment. Tous les projets sont présentés transversalement, et tout le monde peut donner son avis. Aujourd’hui, c’est très différent de nos débuts. Pour le dire simplement, nous ne faisons plus de la récup’ Renault au sens strict. Quand le groupe développe une nouvelle plateforme - donc des modèles derrière - la place de Dacia est déterminée dès le départ. Si l’on gagne un peu de temps sur certains éléments partagés, par exemple sur Sandero/Clio, déterminer l’identité de Dacia reste un beau challenge.
« Nous ne faisons plus de la récup’ Renault au sens strict. »
Dacia vient de changer de logo. Pourquoi était-ce nécessaire ?
C’est une façon de moderniser une marque avec finalement peu d’investissements. Nous avons banni la finition chrome qui n’est plus très à la mode, mais surtout parce que cela coûte plus cher et parce que le volet chimique qu’il impose n’est pas très écologique. Le nouveau logo est très représentatif de Dacia : simple, mais impactant. Je tiens à dire que nous avons fait la transition sur toute la gamme en même temps, ce qui est une première dans le secteur automobile.
>> Lisez aussi - Dacia, un nouveau logo pour une nouvelle identité
Ces nouveaux logos sont présentés en blanc, un pari audacieux ?
Justement ! C’est ce que je veux pour Dacia : de l’audace accessible. Pourtant il ne s’agit que de logos blancs, mais qui tranchent élégamment avec les teintes de notre nuancier. Le blanc apporte toujours un côté chic. Cela pourra évoluer. Nous pourrions faire du « ton sur ton » ou du noir, pour l’une ou l’autre série spéciale…
Revenons à Manifesto, comment est né ce concept ? Pourquoi un buggy ?
Manifesto est le premier concept de loisir, d’exploration de la marque Dacia. Il devait donc être inédit. En cela, il a motivé les équipes. Très vite, un engin de loisir de type tout terrain s’est imposé, parce que l’univers des activités outdoor fait aujourd’hui partie de l’ADN de Dacia. Après, en poussant notre leitmotiv de « minimalisme juste », nous sommes arrivés, presque logiquement, à ce buggy polyvalent. Nous avons œuvré très différemment, en ce sens que le Manifesto est passé de l’ordinateur au concept que vous avez sous les yeux. Pas de maquettes à l’échelle. Ce qui a permis de le réaliser en six mois, depuis l’idée de base. Cela prouve aussi que l’on peut gagner du temps – donc des coûts - dans la conception d’une automobile.
Qu’y a-t-il à retenir de plus intéressant dans le concept Manifesto ?
Son dépouillement total ! C’est l’essence de la mobilité sur 4 roues. Ni portes, ni vitres, ni même pare-brise. Par contre, il est ultra-efficace dans plein de situations et surtout quelle allure ! Sa plateforme arrière peut devenir un établi à outils. Regardez sa proue, elle ne comporte qu’un seul phare principal (car finalement, pourquoi doubler les coût de l’éclairage) qui peut se désolidariser de l’auto et éclairer, par exemple une pièce de vie, ou une soirée camping entre amis. J’aime aussi notre planche de bord en liège, un matériau écologique, mais aussi un support pour y punaiser une carte routière ou un aide-mémoire, par exemple.
Qu’elle est la suite pour le concept Manifesto ?
Il est évident qu’en tant que tel nous ne le commercialiserons jamais. Mais c’est justement l’absence de potentiel industriel qui a généré un énorme engouement de nos équipes. Et qui fait naître les bonnes idées, elles, industrialisables. Avec Manifesto nous voulions surtout montrer au monde, à nos clients, que chez Dacia ça bouge. Nous donner la liberté de créer un tel véhicule, c’est assurer nos clients que nous travaillons d’arrache-pied sur nos futures Dacia, pour les surprendre.
Les nouvelles Dacia s’inspireront de Manifesto ? Le prochain Duster, par exemple ?
Vous retrouverez des détails ou du style que vous observez aujourd’hui sur le concept, la galerie de toit YouClip en est un bon exemple. Quand il n’y a rien dessus, elle reste parfaitement plate, aérodynamique. Si vous avez besoin de charger, vous sortez les ergots intégrés. Un autre élément commercialisable pourrait être le revêtement matelassé des sièges. Au sujet du futur Duster, je vous invite à admirer de près le concept Bigster (présent lors de notre visite, ndlr), qui est vraiment proche du produit final. Avec le style du Bigster, nous serons présents dans les segments B et C.
NE MANQUEZ RIEN DE l’ACTU AUTO!
Derniers modèles, tests, conseils, évènements exclusifs! C’est gratuit!