Edito / Outbox - Le retour des barrières

C’était un jeudi soir banal. Vous savez, ce genre de soirée où la seule activité envisageable est de se laisser glisser dans le canapé devant la télé, à deux doigts du week-end. Avec le soleil de fin d’hiver annoncé à la météo, tout semble pour le mieux. Jusqu’à ce que le smartphone sonne. WhatsApp indique que c’est notre grande amie habitant à 1000 km de chez nous. Cool, ça faisait longtemps. Mais nous désenchanterons vite. Elle est en pleurs et complètement perdue. Elle nous annonce une séparation difficile. Ni une, ni deux, la décision est prise : nous partons la rejoindre. C’est à ça aussi que sert une voiture non ? Pouvoir partir sur un coup de tête pour plusieurs centaines de kilomètres pour venir en aide à un proche en détresse.

Et c’est là que tout se complique. En ce début mars, les départements français que nous allons traverser exigent des pneus hiver depuis novembre 2021. Il est bon aussi de prévoir la vignette Crit’Air pour Strasbourg et un éventuel pic de pollution au retour. N’oublions pas non plus la vignette suisse et le péage en France et en Italie. Et vu qu’on évitera l’Allemagne et Freiburg (im Breisgau), pas besoin de la Feinstaubplakette. Pourquoi tout cela ? Parce qu’il suffit de sortir de l’autoroute ou de s’engouffrer sur un périphérique urbain en LEZ pour se faire piéger.

À force de contraintes contre l’automobile, les barrières aux frontières ont été remplacées par les caméras ANPR et les vignettes environnementales.

Par chance, la voiture en test est chaussée de pneus hiver. Il ne reste plus qu’à commander en ligne la vignette française et d’imprimer la facture avec le fac-similé de l’écopastille (qui arrivera dans la boîte aux lettres quand la voiture sera déjà de retour chez l’importateur). Quant à la vignette suisse, il faudra penser à l’acheter à 39-40 € près de la frontière franco-suisse, et pas à 44 € sur une aire de services autoroutière belge. Le boîtier de télépéage international est fixé à la voiture et vogue la galère. On a un peu de bol, la voiture du moment n’est pas une électrique avec une faible autonomie. Mais une « mild-hybrid ».

Heureusement, toutes ces subtilités, nous les connaissons. Ce n’est sans doute pas le cas de M. et Mme Tout-le-monde. Il est facile d’oublier une formalité, surtout en cas de départ précipité. Et encore, on évite le test PCR. Même s’il fallait encore montrer patte blanche avec le Covid Safe Ticket un peu partout. L’Union européenne et l’espace Schengen, nous promettait-on, devaient faciliter les déplacements à travers le continent. Mais ça, c’était avant. À force de contraintes contre l’automobile, les barrières aux frontières ont été remplacées par les caméras ANPR et les vignettes environnementales. L’absence d’un minimum de standardisation des règles routières impose de vérifier pour chaque pays les exigences en matière d’accès aux villes (le piège des ZTL italiennes est champion toutes catégories), de péages et d’équipements (pneus, triangle, trousse de secours). Une perte de temps par manque de dialogue et d’intelligence politique au détriment de notre mobilité. Et pas uniquement celle en voiture.