En lançant la F-Type «Mark I» à Paris en 2012, Jaguar avait eu le nez fin et rassuré sa clientèle historique tout en lui permettant enfin de disposer d’un modèle capable de rivaliser avec les stars du segment, essentiellement la 911 d’ailleurs. Certes, celle-ci reste indéboulonnable, mais pour la première fois, les Anglais disposaient d’une alternative crédible, ce que n’étaient pas les XK8 de 1996 et XK de 2006. Mais 8 ans, avec peu d’évolutions intermédiaires, ça commençait à faire beaucoup pour garder les projecteurs braqués sur soi. Rafraîchir tant les coupés que les roadsters constituait donc la première mission du nouveau patron du design, Julian Thompson, qui a récemment pris le relais de l’emblématique Jan Callum.
Ligne affinée
En l’occurrence, Julian Thompson a pu compter sur une technologie qui n’existait pas en 2012 : les feux LED matriciels. Ce sont en effet eux qui lui ont permis de dessiner des blocs optiques avant très fins, qui étirent visuellement la largeur de la voiture et lui donnent ce côté félin. Les feux arrière s’affinent eux aussi et se rapprochent visuellement de ceux de l’I-Pace électrique. Un clin d’œil à l’avenir ? La F-Type gagne de fait en finesse ce qu’elle perd en originalité, mais reste un modèle équilibré, fluide et racé. Il garde heureusement ces épaules arrière très marquées, cette ceinture de caisse à décrochage, cet habitacle très reculé derrière un long capot et cet arrière tronqué à la verticale, au ras des roues postérieures. Pas de grand changement à l’intérieur en revanche, si ce n’est l’adoption d’un bloc d’instruments digital de 12,3 pouces, dont l’affichage est paramétrable ainsi que de nouvelles fonctionnalités de connectivité. La F-Type reste donc une stricte 2 places aux espaces de rangement comptés, mais qui s’apprécie dès que l’on met le moteur en route, même si le démarrage du V8 a cette fois été voulu beaucoup plus discret que précédemment. Histoire de ne plus réveiller tout le voisinage.
Sur la route
Notre prise de contact démarre avec un roadster P300, entendez motorisé par le 2 litres turbo de 300 ch. Discret, le démarrage du moteur s’accompagne aussi d’une sonorité quelconque, sans noblesse malgré les efforts fournis par l’échappement pour tenter de lui donner un peu d’élégance. Sauf à passer en mode Sport, c’est raté. Cependant, à l’usage, on apprécie le côté rageur du 4-cylindres et sa relative disponibilité à bas régime. Il accepte de relancer, bien aidé par la vigueur de la boîte 8 automatique. Certes, il ne procure jamais ce coup de pied aux fesses et n’a rien de bestial, vu le poids de l’engin. Mais ainsi équipée, la F-Type roadster s’apprécie paisiblement et n’est pas exempte d’un certain dynamisme. En revanche, pour la sonorité, la musique et la noblesse mécanique, passez votre chemin.
Changement de registre quand on passe à la P450. Toujours en propulsion en l’occurrence. Sans doute « the perfect match » comme disent les Anglais. Une belle cohérence, une rondeur de V8 « sural’ », de la réponse à chaque instant, de la mélodie et un poids sur le train avant qui reste raisonnable et qui ne dégrade pas le bel équilibre de base. Avec 450 ch et 580 Nm, la masse de 1700 kg passe plus inaperçue et si ce roadster accepte de cruiser gentiment et en tout confort, il peut aussi se montrer plus méchant, voire redoutable. Le châssis fait du très bon boulot, la motricité excelle (sauf à conduire comme un barbare, l’ESP n’est jamais intrusif), preuve du bien-fondé des évolutions apportées au châssis et la direction se montre de fait précise et communicative, agréable aussi. Bref, si hier les versions V6 nous semblaient les plus cohérentes, dorénavant ce titre est attribué à la P450 en version propulsion. C’est un peu plus cher, mais… c’est beaucoup mieux que la P300, à condition de pouvoir assumer la charge fiscale et sans doute aussi la conso.
Bestiale P575
Que dire alors de la P575, dénommée « R »? Déjà qu’elle affiche la puissance de la SVR précédente. Ce qui veut dire aussi que la future SVR, si elle se confirme, devrait dépasser les 600 ch a priori. En attendant, 575 ch et 700 Nm, ça commence à « causer dans le poste ». On l’a essayée en version coupé, mais un roadster existe. Là, on fait dans le genre brutal, sans concession. Le raffinement passe au second plan. Les virages commencent à sauter à la figure, mais heureusement, cette F-Type extrême est aussi… extrêmement compétente. D’abord, elle dispose, et c’est heureux, de la transmission intégrale. Ensuite, son châssis affûté lui permet de voir venir et ses vitesses de passage en courbe peuvent en surprendre plus d’un. Y compris sur les routes détrempées de notre parcours d’essai. Allez, il ne lui manque que les roues arrière directrices pour gagner un peu d’agilité dans le serré. Comme sur une Mercedes-AMG GT par exemple. Ou une 911 Turbo. Franchement, c’est démesuré, difficilement justifiable, politiquement très incorrect, anachronique, supersonique… Mais qu’est-ce que c’est bon ! Si les dinosaures vivent leurs derniers jours, au moins profitons de leur présence avant qu’ils ne soient tous passés sur la chaise… électrique.
Verdict
Soyons de bon compte, la F-Type n’est pas foncièrement nouvelle. Il s’agit en l’occurrence plutôt d’une remise à jour essentiellement visuelle qui doit permettre au nouveau designer maison – Julien Thompson – de prendre ses marques. Ce qu’il a fait avec un certain bonheur. Pour le reste, les évolutions apportées au châssis le rendent encore plus compétent, y compris dans l’optique d’une utilisation quotidienne grâce à un niveau de confort en rien altéré par des prédispositions sportives. Mais depuis la disparition malheureuse du V6, c’est le V8 de la P450 qui nous semble aujourd’hui le choix le plus cohérent. Si possible en version propulsion. Après, coupé ou cabriolet, ce sera une question de goût.
Dans cet article : Jaguar, Jaguar F-Type
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