Opinions / Rédacteur sans filtre – L’écologie à l’abri des remparts

Au-delà de leur rigueur journalistique et de leur point de vue de professionnels de l’automobile, les membres de la rédaction sont avant tout des automobilistes et des citoyens lambda. Dans « Rédacteurs sans filtre », c’est le cœur qui s’exprime avant tout ! 

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«Et toi, voyageur: as-tu payé l’octroi et le tonlieu à notre seigneur?» Le prévôt veillait à recouvrer les taxes auprès des visiteurs pénétrant l’enceinte des villes fortifiées du Moyen-Âge. Ces vieilles murailles sont devenues attractions touristiques. Pourtant, la bastide léonine est bien de retour à grand renfort de caméras chargées de contrôler les immatriculations, tickets et/ou vignettes. Chaque ville se referme ainsi sur elle-même, au bon vouloir de ses dirigeants voulant l’autorité incontestable. Les zones de basses émissions renforcent les sentiments d’inégalités et de privations. Sous prétexte de vouloir «sauver la planète» (un slogan sémantiquement contestable), on déploie des systèmes coercitifs inquisiteurs au nom de la nouvelle doctrine au lieu de prôner le dialogue, la solidarité et la justice sociale au service d’une mobilité plurielle et efficace sans exclusion ni frustration.

Les zones de basses émissions renforcent les sentiments d’inégalités et de privations.

La vérité se construit autour de la réalité des faits avec les éléments dont on dispose. Elle est «falsifiable» pour être philosophiquement précis. Comme l’a très justement écrit Khalil Gibran dans son long poème «Le Prophète»: «Ne dites pas: ‘J'ai trouvé la vérité’, mais plutôt: ‘J'ai trouvé une vérité’». Ce n'est pas une contestation ou une remise en question du travail sérieux des scientifiques qui, justement, s’attachent à multiplier les expériences et vérifications pour cerner au mieux la réalité. Par contre, l’analyse et l’interprétation des résultats de leurs recherches doivent impérativement être mises en perspective avec les autres champs empiriques des connaissances, comme la sociologie, la psychologie et la critique historique. Pourquoi? Pour éviter de fausser le discernement de la réalité avec une véridicité étriquée ou falsifiée, il est nécessaire de prendre du recul, d’oser changer de paradigme et de ne jamais croire en son infaillibilité.

Dès lors, Messeigneurs: vous voulez sauver la planète? Battez-vous d’abord à sauver les êtres humains de toutes ces barrières qui les empoisonnent. Développez des services publics efficaces. Aidez la science à découvrir des technologies durables et accessibles au lieu de la récupérer pour faire de la politique et de la fiscalité. Repensez l’accès des pouvoirs publics aux moyens financiers pour le bien des citoyens en vous rappelant que l’argent monétaire n’est pas une ressource naturelle épuisable, lui. Évitez de transformer la conscience écologique en une idéologie qui frise le prosélytisme religieux. Déstigmatisez et laissez à chacun la liberté de découvrir la planète à pied, à vélo, à moto, en voiture, en train, en bus, en avion, en trottinette, en voilier ou à cheval. Pour offrir un monde plus juste et plus tolérant afin que sa protection devienne instinctive, sans brimer. Car chacun de nous n’aime-t-il pas préserver ce qui le réconforte et le protège, tout naturellement?