La renaissance d’une marque est toujours une bonne occasion pour retracer l’histoire de sa genèse. Celle de Smart remonte au début des années 90, lorsque le fondateur de Swatch, Nicolas G. Hayek, glissait à divers constructeurs l’idée d’une micro-citadine respectueuse de l’environnement. Chez Volkswagen, le sauveur de l’industrie horlogère suisse trouvait porte close, mais du côté de Mercedes, on appréciait ce concept de modèle biplace économique en mesure de révolutionner la mobilité urbaine. Des business plans étaient définis, des concept-cars développés et des discussions menées en vue d’un nouveau site de production dans la zone frontalière franco-allemande. Mais cette coopération tombait à l’eau quand il apparaissait que Mercedes ne voulait pas des groupes propulseurs électrifiés que Hayek avait alors déjà à l’esprit. Déçus, les Suisses se retiraient du projet tandis que les Allemands ajustaient leur concept selon leur vision.
Ce qui devait être une petite voiture abordable construite selon les principes de production simplifiés des usines horlogères Swatch se transforma en 1998 en une micro-citadine onéreuse produite selon les codes de Stuttgart. Le design compact, prévu pour «deux passagers et autant de bacs de bières» fut conservé, mais on n’a finalement guère vu ces fameux panneaux de carrosserie personnalisables. La version électrique se fera finalement attendre dix ans, en 2009. Et il en faudra dix de plus encore pour que Mercedes décide de proposer sa ForTwo uniquement en variante à batterie.
Sans guère de surprise, la sous-marque était mise sous l’éteignoir voici quelques années, jusqu’à ce que le spécialiste chinois des VE, Geely (surtout connu en Europe pour les marques Volvo, Polestar et Lynk & Co), se porte acquéreur de 10% des parts de Mercedes pour 9 milliards de dollars. En 2019, les deux géants créaient une joint-venture à 50/50 pour faire renaître Smart, une marque qui n’a désormais plus rien en commun avec le concept de Hayek.
Carrosserie et dimensions
Le premier modèle, baptisé «hashtag-one», est un crossover du segment B, s’approchant toutefois du segment C avec ses 4,27 mètres de long. Moderne, la plateforme SEA provient tout comme l’architecture électrique de Geely, Mercedes prenant en charge le design et le concept User eXperience. Ce dernier réunit le contrôle global du véhicule et le système d’infodivertissement, associé à tous les systèmes de sécurité active et passive modernes.
Intérieur et coffre
La présence du subwoofer fait perdre 10 litres de volume pour les bagages sous le plancher du coffre, qui n’est plus réglable. À l’avant, vous pouvez déposer seulement 15 litres de bagages. Juste assez donc pour le kit légal. En guise de compensation, l’espace intérieur est étonnamment vaste, avec suffisamment de place pour accueillir quatre ou cinq adultes pouvant parfaitement s’installer de manière confortable même s’ils mesurent près de deux mètres, comme nous. La seule condition alors, c’est de voyager très léger quand tous les sièges sont occupés et la banquette arrière dans la position la plus confortable, puisqu’il ne reste alors que 313 litres pour les bagages.
Ce qu’on apprécie moins, c’est que quasiment toutes les fonctions se contrôlent via l’écran d’infodivertissement de 12,8 pouces. Même pour ajuster les rétroviseurs extérieurs, il faut se plonger dans les menus. Si certains se trouvent directement, d’autres réclament des talents d’explorateur. Le mariage entre le côté sérieux des Allemands et la frivolité asiatique n’est pas une évidence en soi, ce qui se traduit par une interface pas toujours facile à comprendre. Déclenchées par un «Hello Smart», les commandes vocales sont heureusement efficaces, et votre progéniture appréciera aussi le renard animé qui les divertira pendant la recherche numérique.
Malheureusement, cette mascotte n’a pas pu nous dire comment désactiver la multitude de messages et sons d’avertissement, bien que cela doit être possible de le faire d’une manière ou d’une autre. Les rares commandes logées sous l’écran ou au volant sont en outre tactiles ou manquent de contraste pour les identifier aisément.
Spécifications et performances
Au lancement du modèle sur le marché européen en fin d’année, une seule motorisation sera proposée sur la #1. Une deuxième est annoncée. À la base, la nouvelle Smart associe une batterie de 66 kWh (capacité nominale) à un simple moteur électrique sur l’essieu arrière. La batterie est de type lithium-ion NCM (nickel-oxyde de cobalt-manganèse), la puissance standard s’élevant à 200 kW, soit 272 ch. De quoi permettre à la #1 d’atteindre 100 km/h en 6,7 secondes avec une autonomie maximale de 440 km pour une consommation WLTP théorique de 16,7 kWh/100 km.
Pour ceux qui en veulent plus, il y a la version Brabus. Elle utilise la même batterie, associée à un deuxième moteur électrique sur l’essieu avant, pour une puissance systémique de 315 kW ou 428 ch. Le couple grimpe alors de 343 Nm à 543 Nm, le chrono du 0-100 chutant de 6,7 à 3,9 secondes.
Autonomie et charge
Dans sa version de base, la Smart #1 est dotée en série d’un chargeur (monophasé) interne de 7,4 kW, mais dès l’exécution Premium, on retrouve un onduleur triphasé capable de charger à 22 kW. Celui-ci permet de se brancher sur une borne de la même puissance en courant alternatif pour recharger la batterie de 10 à 80% en environ 3 heures. Avec une borne rapide, la recharge peut se faire à 150 kW. En courant continu, le même exercice sera donc plié en une demi-heure environ.
Dans les collines autour de Lisbonne, un environnement idéal pour les VE grâce à la récupération d’énergie dans les descentes, notre consommation était inférieure à 20 kWh, ce qui implique un rayon d’action réel d’environ 350 km. En étant attentif et en faisant souvent usage du mode autonome Level 2+, les 400 km doivent pouvoir être atteints.
Conduite
Avec une telle expérience digitale, on en oublierait presque qu’une voiture, c’est fait pour être conduit. Le démarrage est aisé avec la palette de sélection empruntée à Mercedes à droite du volant. Mais difficile par contre d’imaginer que l’on a 272 ch aux roues arrière. Dans son mode standard, la #1 ne développe pas cette puissance, et elle se montre plutôt confortable sur la route. La direction réagit bien et les performances de freinage sont correctes. La suspension passive est orientée vers le confort et autorise quelques mouvements de caisse. Pour savourer les performances du propulseur électrique, il faut passer du mode Eco ou Normal au mode Sport. La direction se fait alors un peu plus lourde, le freinage reposant aussi davantage sur le moteur électrique.
Il n’existe pas de manière simple d’ajuster selon ses préférences la récupération d’énergie au freinage, par exemple avec des palettes au volant. Pour cela, il faut à nouveau plonger dans les menus, qui offrent au-delà des modes de conduite encore deux options pour ajuster le frein moteur. Nous n’avons toujours pas compris pourquoi le mode «une pédale» ne peut être activé qu’après un délai d’attente de 10 secondes. Une fois ce mode sélectionné, il faudra s’habituer aux réactions du système. Sur la plupart des VE, le freinage automatique d’un système de ce type débute dès que l’on relève le pied de la pédale d’accélérateur. Pas sur cette #1, qui évolue brièvement en roue libre avant de décélérer, ce qui ne facilite pas le dosage.
À l’accélération, les roues arrière motrices aident à faire passer la puissance au sol, avec un léger survirage qui favorise les transferts de masse et l’inscription dans les virages serrés. En ayant relégué aux quatre coins les roues de 19 pouces, Smart a optimalisé l’habitabilité, mais aussi le plaisir de conduire, qui est assez appréciable lorsque le bon mode de conduite est sélectionné. Les sièges avant offrent en outre un soutien efficace au niveau du dos, le volant tombant bien sous la main.
Prix belges de la Smart #1
Pour cette prise en main, nous avons pu conduire la #1 en exécution Premium, qui se positionne entre l’entrée de gamme Pro+ (dès 40.495 €) et la Launch Edition (dès 45.295 €), limitée à 1.000 exemplaires. La variante Brabus coûtera 47.995 €, alors que notre Premium s’affiche à 43.995 €. Pour ce prix, vous disposerez d’un toit ouvrant panoramique, des phares LED+ avec feux de route adaptatifs, d’une pompe à chaleur, d’un assistant de stationnement doté de 12 capteurs, d’un intérieur cuir, d’un affichage tête haute de 10 pouces et du système audio Beats.
Et la qualité perçue là-dedans? Elle s’avère assez bonne sur la Premium, les plastiques durs étant alors remplacés par des éléments peints, qui sont peut-être aussi bon marché à produire sans en donner l’impression. Seuls les espaces de rangement logés sur la console centrale de la #1 font plutôt cheap. De toute façon, à l’ère des VE, personne n’achète plus une voiture pour la vie entière, préférant le leasing ou la location à durée limitée.
La nouvelle direction de Smart, tout à fait indépendante de la hiérarchie Mercedes, est occupée à définir les options et la communication pour les mois à venir. Les concessions Mercedes possédant encore un espace Smart seront en charge des ventes et de la maintenance de la nouvelle gamme Smart, qui s’élargira rapidement. La plateforme de réservation en ligne est déjà ouverte. Les commandes seront prises dès le 4 décembre, avec des livraisons débutant à l’été 2023.
Smart #1 - verdict du Moniteur Automobile
La #1 débarque avec une propulsion électrique et un concept intérieur optimalisant l’habitabilité. Mais l’ancienne et la nouvelle Smart n’ont plus rien en commun, la micro-citadine s’étant muée en un crossover moderne affichant une puissance généreuse et un tarif salé. Mais est-il tellement salé quand on regarde les offres de la concurrence? Par le passé, une Smart coûtait le double d’une voiture classique. Cette #1 est quant à elle parfaitement en phase avec ce qui se pratique aujourd’hui. Et puis, ce VE fait bien les choses, même s’il baigne dans une sauce numérique qui ne sera pas du goût de tous. Mais à chacun ses préférences évidemment, surtout quand on essaye de combiner cuisine asiatique et allemande.
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