Bible des restaurants et hôtels, le Guide Rouge Michelin était d’abord un guide pour voyager en France. Il était déjà rouge en 1900 mais s’appelait simplement le « Guide Michelin ». Ce petit bouquin de 400 pages, en format poche, était gratuit. Il avait pour objectif d’inciter les automobilistes à se déplacer… pour user les pneus.
Idée de génie
Le livret rouge du Michelin est d’abord un outil marketing offert aux chauffeurs lors de l’achat de leurs pneumatiques. À l’époque naissante de l’automobile, nous sommes en 1900, les routes et chemins n’étaient pas encore balisés comme maintenant. Et que dire de l’approvisionnement en carburant ? Et puis, il n’y avait pas de services de dépannage alors que les voitures étaient fragiles et que les durées de trajet pouvaient s’étaler sur plusieurs journées. André Michelin et son frère Édouard présentent leur livret lors de l’Exposition universelle de Paris en 1900. Selon leur communication, cet ouvrage « donner tous les renseignements qui peuvent être utiles à un chauffeur, voyageant en France, pour approvisionner son automobile, pour la réparer, pour lui permettre de se loger et de se nourrir, de correspondre par poste, télégraphe ou téléphone. »
Indispensable
Entre les publicités de vendeurs de cycles et d’automobiles, dont celle des voitures électriques Columbia (pour rappel, cela date de 1900), le Guide Michelin donne des conseils pratiques pour entretenir et réparer sa voiture. Et bien sûr pour gonfler, réparer et changer ses pneus. On y retrouve aussi les taxes automobiles (pouvant monter jusqu’à 110 francs français de l’époque, soit près de 450 € en 2020), un calendrier, un lexique et des conseils de premiers soins. Mais ce qui est surtout intéressant, ce sont les bonnes adresses dans chaque ville et village importants. Tel qu’il apparaît comme indispensable pour se déplacer dans l’Hexagone aux commandes d’une de ces drôles de machines. Pour sa première édition, il sera tiré à 35.000 exemplaires. Les chiffres monteront très vite par la suite…
La pharmacie ?
Les renseignements donnés sur les villes dans l’édition de 1900 sont d’abord administratifs (préfecture, mairie, poste, gare des chemins de fer). Le guide renseigne également sur les chambres noires (pour développer les photos), sur les bureaux télégraphiques et sur les postes téléphoniques. Lors des pauses, quelques hôtels sont mentionnés avec ordres de prix, mais pas encore à la manière du Guide Rouge actuel. Quelques villes importantes ont également droit à un plan sommaire, comme dans le Guide Vert actuel. Il y a aussi les distances entre les villes. Mais le plus important, cela reste les indications sur la présence d’un mécanicien (ou la distance du plus proche) avec des informations sur son matériel et le type de réparations possibles chez lui. Il y avait également l’indication de la présence de distributeurs de carburant. À l’époque, c’était soit un garage, soit un distributeur agréé, soit un droguiste, soit le pharmacien ! D’où, pour les petites villes, la mention d’une pharmacie ou d’un médecin de campagne. Pour faciliter la lecture, Michelin utilisera des pictogrammes, dont certains existent encore de nos jours.
Cales de roue
Le Guide Michelin restera gratuit, financé par des publicités, jusqu’en 1920. Le revirement de politique marketing est assez cocasse. Selon l’histoire officielle, André Michelin aurait découvert qu’un distributeur de pneus aurait utilisé les guides pour caler les pieds de son établi. Le sang de l’homme d’affaires ne faisant qu’un tour et puisque « l’homme ne respecte vraiment que ce qu’il paye », il décide l’année suivante de proposer le guide au tarif de 7 francs. Mais sans plus aucune publicité. C’est à partir de cette date que les hôtels et restaurants seront référencés. Les meilleurs recevront une étoile dès en 1926. En 1931, la classification va de 0 à 3 étoiles. Le Guide Rouge tel que nous le connaissons était né. Michelin n’a pas imaginé que le Guide pour faciliter les voyages en automobile. On lui doit aussi la signalisation routière et la classification des routes en France ainsi que ses célèbres cartes routières. Tout cela avait un but bien mercantile : inciter les acheteurs de pneus Michelin à rouler souvent… Et donc à devoir changer de pneumatiques régulièrement. Donner le goût du voyage et des bonnes tables pour vendre des boudins de caoutchouc. « Nunc est bibendum* » !
* « C’est maintenant qu’il faut boire », expression tirée d’un vers d’Horace, reprise par Michelin pour une publicité « Michelin boit la route » et qui a donné le nom de la mascotte de la marque, le fameux bonhomme Bibendum.
NE MANQUEZ RIEN DE l’ACTU AUTO!
Derniers modèles, tests, conseils, évènements exclusifs! C’est gratuit!